Ils sont plus de 30.000 fonctionnaires et agents de l’Etat de Côte d’Ivoire, victimes de surendettement dû au prêt à l’usure communément appelé « système margouillat ». L’information a été rendue public, mercredi 02 février à Abidjan au cours d’une séance de travail entre les Ministres Myss Belmonde DOGO et Anne-Désirée Ouloto. La présentation des résultats de l’enquête sur le phénomène a mis en lumière les principales causes, les manifestations et les conséquences de cette forme de précarité et de vulnérabilité qui touche de nombreux ménages.
Ladite enquête a de prime abord révélé qu’en plus des usuriers, le surendettement des fonctionnaires et agents de l’Etat tire son origine des banques, des microfinances, et des maisons d’assurance notamment.
Plusieurs facteurs expliquent le surendettement de cette frange de la population. Il s’agit de l’acquisition de biens (produits de première nécessité et de matériaux de construction), les dépenses familiales, les investissements dans des activités génératrices de revenu et les loisirs. Par ailleurs, le rapport de l’enquête mentionne que : « les acquisitions de biens représentent 49,26% comme cause profonde de l’endettement suivie des dépenses familiales qui elles représentent 28,57%. ».
Selon les indicateurs identifiés par l’étude, « plus de 60% prêts sont contractés par les fonctionnaires pour faire face aux charges familiales ». Elles concernent entre autres la scolarisation des enfants, les frais médicaux, l’alimentation, et surtout les sollicitations de la famille élargie comme l’organisation des funérailles, des fêtes de générations, les mariages et autres évènements.
Toutes ces pressions sociales conduisent le fonctionnaire dans une situation vulnérable. Ce qui a une incidence négative sur son quotidien, tant sur sa productivité et son assiduité au travail que sur sa vie dans la société. « Plus de 80?s fonctionnaires surendettés s’absentent au travail, abandonnent leur poste, disparaissent ou envisagent le suicide » indique le rapport de l’enquête.
« On parle de surendettement lorsque 70% du salaire du fonctionnaire est confisqué par la dette et les travailleurs, sujets de ce phénomène vivent le plus souvent dans des situations de fragilité individuelle, familiale, sociale, économique et géographique » a fait remarquer Myss Belmonde DOGO.
Au regard des résultats de l’étude menée sur le surendettement des fonctionnaires et agents de l’Etat, la Ministre de la Solidarité et de la Lutte contre la Pauvreté a par ailleurs souligné que cette situation ruine la vie de cette frange de la population et impacte considérablement la croissance économique du pays. C’est pourquoi son département, en collaboration avec tous les ministères et institutions concernés par ce fléau, veut mettre les bouchées doubles pour réduire voire enrayer cette forme de vulnérabilité. « Le Ministère de la Solidarité et de la Lutte contre la Pauvreté, chargé de la coordination et de la mise en cohérence d’approches intégrées et novatrices de réduction de la pauvreté, s’est saisi de la question du surendettement des Fonctionnaires et Agents de l’Etat, comme étant un domaine qui mérite une attention particulière en vue de participer à l’atténuation de la pauvreté et de contribuer à l’inclusion sociale de cette frange importante de la population » a déclaré Myss Belmonde DOGO.
Malgré les efforts du Gouvernement sur la revalorisation salariale par le déblocage des avancements indiciaires dans le but d’améliorer les conditions de travail et le niveau de vie des fonctionnaires, la problématique du surendettement est toujours d’actualité.
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C’est fort de ce constat que, Anne-Désirée Ouloto, Ministre de la Fonction Publique et de la Modernisation de l’Administration préconise la mise en place d’un comité technique élargi qui prend en compte tous les ministères concernés et institutions pour analyser davantage la question et dégager des pistes de solutions pour réduire cette forme de vulnérabilité des travailleurs.
Selon les résultats de l’enquête, les sollicitations de la famille élargie dus à l’organisation d’événements grandioses sont l’une des causes principales du surendettement. D’où la nécessité d’impliquer les Chefs religieux et coutumiers.
Selon la Ministre de la Fonction Publique et de la Modernisation de l’Administration, ces autorités coutumières et religieuses sont parmi les personnes les plus influentes et respectées dans la société. Leur contribution dans la lutte contre ce fléau, aussi lié à la coutume et aux traditions doit se faire par un accompagnement des travailleurs dans la gestion des affaires sociales et familiales. Pour ce faire, elles doivent accentuer la sensibilisation afin que les fonctionnaires tournent définitivement le dos aux habitudes liées aux contractions de prêts auprès des usuriers et autres structures informelles.